23/11/2007

LA MERE, L'ENFANT ET LE SOIGNANT

Grâce aux progrés de la médecine, des enfants atteints de maladies autrefois mortelles peuvent aujourd'hui espérer mener une vie normale.[c=#ffee00] Mais on n'imagine pas toujours ce qu'ont à assumer les familles et les jeunes patients. C'est la mère qui est en première ligne.Chaque fois qu'un enfant est gravement malade, les familles sont conduites à s'impliquer dans les soins et accumulent un savoir parfois très «pointu».[/c] Elles ne peuvent donc imaginer que, dès le seuil de l'hôpital franchi, leur rôle va s'arrêter. Il ne faut pas nier l'aide concrète qu'apporte la mère quand elle prend en charge certaines prescriptions, quand elle marque son opposition à certaines situations. Vigilante comme une louve, elle pointe les «aberrations», relève les incohérences de la prise en charge de la douleur ...Il n'est pas facile d'assumer tous les rôles, car alors ce qui est dénié à la mère, c'est son besoin d'être elle-même soutenue et prise en charge. Dès le premier contact avec le service hospitalier, on ressent un manque. Ce «je ne sais quoi», comment le définir ? Une aide concrète, une information pratique, une réassurance ; mais aussi des paroles d'accueil et un rapport humain qui contiendrait tous ces ressentis qui se bousculent. C'est tout à la fois un lieu pour «poser ses valises», et la définition d'une «place» où le parent pourrait exercer ses compétences.[/c]Cela touche aux conditions concrètes de l'hospitalisation, il faudrait qu'il se trouve toujours quelqu'un pour prendre sur son temps et vous ouvrir son espace, qui interroge la mère sur ce qu'elle ressent. Par exemple la diététicienne qui offrirait une tasse de café sur un coin de bureau à un moment difficile, et qui deviendrait pour la famille la «nourricière de moral», élue avant tout pour sa qualité humaine et sa disponibilité...[/c]La confiance se donne et se refuse d'un coup, à l'instinct. Dès les premières paroles échangées, tout est dit. Il y a, sans nuance, les bons et les mauvais, et c'est peut-être inévitable. La violence des affects est à la mesure de l'enjeu vital et chacun se sort comme il peut de cet exercice de communication à chaud. Il « faut faire avec » les mots techniques, les abréviations caractéristiques de l'argot hospitalier : langage fonctionnel et efficace, en prise directe sur le réel, mais sans affect.Quand y a-t-il place pour un échange entre l'enfant et un soignant qui ne serait pas un soin au sens habituel, mais que l'on pourrait qualifier de soin relationnel ? Quel temps et quel espace pour le jeu, la chanson, le conte, l'imaginaire ? Est-il si difficile de comprendre que l'enfant a besoin d'élaborer psychiquement sa situation et que le jeu de la piqûre sur la poupée est thérapeutique ? On s'émerveille souvent sur la capacité des enfants à résister aux épreuves, ce qu'on appelle parfois leur résilience. D'où vient cette force ? Plus que dans la vie ordinaire on perçoit dans la maladie, que l'enfant est une personne capable de se représenter avec les moyens de son âge une situation qui le concerne, d'exprimer des opinions, de consentir ou de refuser, d'assumer ou d'appeler à l'aide, de réclamer le respect dû à sa personne et de discerner dans l'attitude d'un soignant quand ce respect lui est refusé.Au total pourquoi est-il intéressant et utile de faire connaître ces expériences sous l'angle de ce que vivent les patients et leurs proches ? Parce qu'elles nous montrent que le «modèle biomédical», s'il rend compte de la rationalité des soins, ne permet pas de saisir toutes les dimensions de l'expérience vécue par l'enfant et sa famille. Dès lors, une grande part de cette expérience ne peut pas être partagée dans le cadre de l'hôpital. C'est probablement ce qui pousse certains à la rapporter. Par la fonction de porte-parole qu'ils assument, ils nous sont précieux.Dr Didier C.

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